Des scientifiques de l’université d’Austin au Texas ont mis au point un décodeur capable de retranscrire les pensées d’une personne avec une précision qui frise la perfection. Pour quelles applications dans le futur ?
Quand informatique et neurosciences s’associent, cela donne naissance à une innovation technologique majeure qui risque de révolutionner la vie humaine. Dans une précédente étude, les universitaires de Zurich mettaient en évidence la possibilité de capter en moins de deux minutes l’empreinte d’un cerveau permettant d’identifier un individu avec une précision proche des 100% (voir article).
Cette fois-ci, les chercheurs américains ont utilisé deux technologies de pointe, un appareil IRM (Imagerie par Résonance Magnétique) et un modèle d’IA (Intelligence Artificielle) de type transformateur afin de décoder l’activité cérébrale et de la retranscrire en langage texte, tout cela de manière non invasive contrairement aux précédentes interfaces cerveau-machine qui exigeaient l’implantation d’électrodes par la chirurgie.
L’activité cérébrale passée au crible
Pour obtenir ce résultat, les scientifiques ont placé trois volontaires dans un appareil d’imagerie médicale et leur ont fait écouter des podcasts racontant des histoires. Pendant 16 heures, ils ont enregistré leur activité cérébrale et observé comment les mots et les idées générées par l’écoute de ces récits activaient les différentes régions du cerveau. Toutes ces données ont ensuite été passées au crible d’un système neuronal artificiel afin de les convertir en langage texte. Les tests, menés cette fois en faisant écouter de nouvelles histoires, ont permis de constater que le réseau décodait sans problèmes ces nouvelles pensées.
A terme, ce nouveau dispositif à visée médicale a pour but de permettre aux personnes lourdement handicapées, qui ont perdu l’usage de la parole et qui ne peuvent pas utiliser un clavier, de communiquer avec leur entourage par le simple fait de la pensée. Même si cette technologie reste perfectible, elle semble particulièrement prometteuse dans la mesure où selon l’un des chercheurs à l’origine de ce procédé, le décodeur IA peut déjà saisir l’essentiel d’une pensée parfois complexe et la retranscrire. En un mot, aller plus loin que les simples paroles…
Dans la tête d’un suspect …
Si l’étude suscite l’intérêt de tous les chercheurs en neurosciences, elle soulève également de nombreuses questions éthiques. Entrer dans la tête d’une personne pour fouiller dans ses pensées contre sa volonté pourrait à l’avenir devenir une réalité. On peut ainsi imaginer que dans le cadre d’une enquête judiciaire où le suspect reste muet et la victime introuvable, les policiers puissent obtenir des réponses et lever une fois pour toute le mystère de certaines disparitions. Et si cette machine avait pu faire « avouer » au cerveau malade de Michel Fourniret le lieu où est enterré le corps de la petite Estelle Mouzin ? Et si dans l’affaire de la disparition de Delphine Jubillar, cela permettait d’incriminer ou au contraire de disculper définitivement son mari actuellement en détention provisoire ? Autant de « si » qui plaident en faveur de ce procédé. A contrario, il peut également se transformer en arme redoutable pour museler la liberté de pensée, une tentation toujours possible dans certains pays pour qui la démocratie n’est pas une priorité.
Un risque qui n’existe pas selon les chercheurs à l’origine de l’étude. En effet, le décodeur ne fonctionne que sur le cerveau d’un sujet qui est entraîné et consentant. Dans le cas contraire, il lui est très facile de mettre en place des tactiques qui vont « saboter » les résultats. En bref, le cerveau humain gagne sur la machine. Pour l’instant…
Sources :
Des chercheurs parviennent à lire dans les pensées grâce à l’IA – Les Numériques (lesnumeriques.com)
L’IA peut maintenant lire vos pensées (iatranshumanisme.com)
Reconstruction sémantique du langage continu à partir d’enregistrements cérébraux non invasifs | Nature Neurosciences